Civilisations précolombiennes : la fin du mythe de la forêt vierge

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Civilisations précolombiennes : la fin du mythe de la forêt vierge

L’Amazonie a longtemps été vue comme une page blanche, une forêt vierge impénétrable, où n’avaient vécu que quelques tribus de chasseurs-cueilleurs primitifs. On sait aujourd’hui que cette représentation relève du contresens historique.

 

L’Histoire précolombienne de l’Amérique du Sud s’est longtemps résumée à celle des Andes et de la Mésoamérique. Éclipsée par les ruines monumentales des anciennes civilisations incas, mayas ou aztèques, l’Amazonie faisait figure de page blanche, une forêt vierge impénétrable, où n’avaient vécu que quelques tribus de chasseurs-cueilleurs primitifs. Or, cette représentation relève du contresens historique.

Ces dernières décennies, les fouilles archéologiques menées dans la région ont révélé une tout autre réalité. Les Amérindiens ont façonné les basses terres amazoniennes pendant des millénaires. À la veille de l’arrivée des Européens, ils étaient 8 à 10 millions à peupler la zone, avant que les maladies des colons n’emportent 90 % d’entre eux et que la végétation tropicale n’engloutisse leur empreinte.

Stéphen Rostain est l’un de ceux qui font parler les vestiges ténus enfouis dans la forêt. Directeur de recherche au CNRS, il est un pionnier de l’archéologie amazonienne, à laquelle il a consacré plusieurs ouvrages, dont le dernier, Amazonie, l’archéologie au féminin, paraîtra en septembre. Entretien.

 

Les découvertes archéologiques de ces trente dernières années ont radicalement changé l’idée que l’on se faisait de l’Amazonie précolombienne. On sait désormais qu’elle était densément peuplée et largement domestiquée. Quelle est l’origine de cette évolution ?

C’est plus qu’une évolution, c’est une révolution. Pendant presque tout le XXe siècle, la science archéologique a suivi un paradigme : la forêt amazonienne est un milieu extrême, qui a forgé la nature des sociétés qui l’ont occupée. Les archéologues considéraient donc qu’il n’y avait rien à chercher dans cette région du monde. Et ce préjugé va plus loin encore. On sait que les Mayas et les Incas actuels n’ont pas grand-chose à voir avec leurs ancêtres précolombiens, car leurs empires ont connu un déclin vertigineux en raison de l’impact bactériologique de l’invasion européenne. Or, on est incapable d’imaginer que les Amérindiens d’Amazonie aient pu eux aussi vivre fastueusement avant l’arrivée des Occidentaux.

En 1989, j’ai survolé la côte de la Guyane française en ULM et j’ai découvert des milliers de petites buttes disposées en damier dans les marécages, sur des dizaines de milliers d’hectares. J’ai mis 25 ans à prouver qu’il s’agissait de champs surélevés. Depuis, on a trouvé des structures agricoles comparables en Colombie, au Venezuela, en Bolivie et en Équateur. Les plus vastes, dans le bassin du San Jorge, en Colombie, s’étendent sur 90 000 hectares.

➡️ La suite de l’article sur le site du National Geographic

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